La promotion 31 des créateurs verriers du Cerfav a bien entamé sa seconde année de formation. En perspective : nos stagiaires mettent en œuvre l’approfondissement de la connaissance du verre, l’élargissement des compétences techniques et de nouveaux défis créatifs pour obtenir leur diplôme en juin prochain. Faisons un premier point d’étape avec eux avant d’entrer dans la phase de réalisation de leurs projets.
Mathis, petit retour en arrière : que t’as apporté ta première année de formation « créateur verrier » et quelles sont tes attentes pour la seconde année ?
Je vais explorer les mêmes thématiques que l’année dernière pour mes projets : la cueillette en design et les cendres de plantes pour l’artistique. En 2023, j’ai utilisé ce que j’ai appris grâce à la verrerie scientifique avec le passage du CAP.
L’année dernière, c’était très cadré avec le passage du CAP. Cette année il y a plus de liberté. On a plusieurs modules avec différents intervenants, par exemple avec Frédéric Demoisson. Ça développe un champ des possibles qui est complètement différent de la verrerie scientifique. On a aussi beaucoup plus de temps pour développer nos projets personnels, notre univers. On part tous sur des chemins techniques différents.
Je vais me concentrer sur le chalumeau, en utilisant le soufflage et le filage de verre. L’objectif est d’utiliser à la fois le verre creux et le verre plein.
Peux-tu nous en dire plus sur tes premières idées pour tes projets de cette année ?
En design, sur le thème de la cueillette donc, je vais me référer à la « théorie de la fiction-panier » d’Ursula K Le Guin. Cette autrice explique qu’au cours de l’histoire, on évoque régulièrement la chasse et la guerre, des sujets « héroïques », mais qu’on oublie de parler de la cueillette, qui existait avant la chasse, alors qu’elle est primordiale. On se nourrissait d’abord de cueillette, puis, parce qu’on avait du temps libre, de chasse.
L’idée est de créer un nouveau récit en m’inspirant de l’univers de l’heroic fantasy ; plus précisément de créer une figure de cueilleuse·eur à laquelle s’identifier. Mon projet prendrait la forme d’un récit et d’une panoplie d’outils en verre dont cette figure serait la propriétaire.
Je vais y mélanger plusieurs matériaux également, en reprenant des éléments naturels, du bois … mêlés au verre.
Et pour ce qui concerne le projet artistique ?
Je continue à travailler sur les cendres et cette fois je m’intéresse aux friches urbaines. L’idée est de réaliser des urnes funéraires, en hommage à une friche qui peut disparaître à tout moment.
Je vais collecter des végétaux dans plusieurs friches, et réaliser un collier de perles colorées à partir des cendres issues de celles-ci, grâce aux oxydes métalliques présents naturellement dans le verre.
Le but est d’aboutir à une sorte de bibliothèque de formes de racines, ces dernières faisant le lien entre la plante et le sol.
Il y a une logique d’inventaire ou il s’agit plutôt de créer un lieu de mémoire ?
L’idée derrière ce projet est de montrer l’importance de ces espaces-là dans les villes, puisque ça permet d’avoir des sortes d’îlots verts. Ce sont des zones délaissées, alors qu’on y trouve un concentré de biodiversité assez riche puisqu’on y a laissé faire le vivant. L’autre intérêt est aussi de montrer que les plantes permettent de dépolluer les sols de manière naturelle.
Dans ma démarche, il y a une volonté d’être dans la sérendipité, et donc de trouver ces friches par hasard. Je vais me diriger vers des lieux qui ne sont pas impressionnants, par exemple une zone de chantier en construction, des endroits que personne ne voit.
J’en ai déjà trouvé une à Nancy où j’ai aperçu un panneau qui réclamait la protection de cet endroit, la façon dont ces personnes essayent de défendre ce territoire m’a intéressé.
Vous pourrez découvrir les projets de diplôme de Mathis Esnault en juin 2024 au cours de l’exposition de fin d’année qui aura lieu au château de Lunéville à partir du 28 juin !